Cet article a été produit dans le cadre du projet « Identités méditerranéennes – respect des identités multiples dans l’espace public méditerranéen : regards croisés nord sud sur le sexisme et le racisme | Marseille – Rabat », axe Développement & Citoyenneté.
« Ce n’est pas parce que les identités-relations sont ouvertes qu’elles ne sont pas enracinées. Mais la racine n’est plus une fiche, elle ne tue plus autour d’elle, elle trace, à la rencontre d’autres racines avec qui elle partage le suc de la terre. » (E. Glissant)
Situé entre Marseille et Casablanca, le projet « Identités Méditerranéennes » vise à créer des passerelles entre des acteurs aux parcours et bagages contrastés sur chacun des deux territoires et entre les deux rives de la Méditerranée. L’enjeu est de permettre à des lycéens et des étudiants de s’approprier les outils du débat et de la réflexion, en leur proposant, durant une année, de participer à un cycle de sensibilisations et d’actions concernant l’impact des discriminations racistes et sexistes sur la construction d’une citoyenneté méditerranéenne et d’un espace public commun. À travers des regards croisés, ils appréhendent la façon dont les identités individuelles se construisent par empilement et par appartenances à des sphères qui varient tout au long de leur parcours de vie.
« Vous sentez-vous Méditerranéen ? »
Dans leur documentaire « En quête d’Identités Méditerranéennes », les lycéens de la classe de 2nde 1 du lycée Artaud (13013), en collaboration avec l’association Les têtes de l’art, ont parcouru les rues de Marseille, caméra au poing, interrogeant plusieurs interlocuteurs sur leurs perceptions de la notion d’identité en Méditerranée. Du conservateur du Musée d’histoire de Marseille, à la vendeuse de poisson sur le Vieux-Port, en passant par les élèves eux-mêmes, les témoignages ont été recueillis sur les questions identitaires en Méditerranée. « Avant, quand on me disait Méditerranée, je pensais à la mer, au soleil… je pensais pas aux autres villes » confie l’une des jeunes filles.
« Tous différents ? »
De leurs côté, les étudiant.e.s du Master L.E.A d’Aix-en-Provence, ont mobilisé des adolescent.e.s de la cité Airbel (13011) en collaboration avec l’association AFEV, ainsi qu’une classe de CE1 de l’école Jean Moulin II à Sénas (13560). Le cycle de sensibilisation et de réflexions, axé sur les discriminations, s’est étalé sur plusieurs mois et a donné lieu à la réalisation du documentaire « Tous Méditerriens ».
« Mon appartenance physique me joue des tours. Mon appartenance ethnique me joue des tours. Mon appartenance religieuse me joue des tours. Suis-je condamnée pour toujours ? ». C’est à l’occasion d’un concours de poèmes, proposé par l’AFEV que des participantes inspirées ont écrit plusieurs textes exprimant leurs ressentis au sujet des discriminations sexistes et racistes dont elles font l’expérience banale et quotidienne. Arrangés et mis en musique, ces textes ont été rappés lors d’un événement organisé par les étudiant.e.s du Master L.E.A à la Villa Méditerranée le 25 juin dernier.
Regards croisés Nord-Sud
Le projet s’étend de l’autre côté de la Méditerranée où les bénévoles de l’association Initiative Urbaine impulsent des actions. Cette association de quartier, implantée dans la commune de Hay Mohammedi, à Casablanca, offre aux jeunes un espace d’épanouissement personnel, de soutien scolaire et d’expression citoyenne. Les collégiens s’y rendent pour suivre des cours de soutien scolaire, puis les années passant, ils deviennent volontaires et finissent à leur tour par donner la classe pour leurs cadets. Se saisissant depuis quelques semaines du projet Identités Méditerranéennes, l’association est actuellement en train de mettre au point des opérations visant à interroger les impacts des discriminations sexistes et racistes dans leur quartier et dans leur ville. Micros-trottoirs, tables rondes et concours de slam, entre autres initiatives, seront bientôt à l’œuvre dans les rues de Casablanca.
Semaine de la Solidarité Internationale
À Marseille, Le Tamis organise, dans le cadre de la Semaine de la Solidarité Internationale, des ateliers portant sur l’identité. En lien avec les Chevauchées du Tamis, ces ateliers invitent à explorer collectivement les imaginaires sociaux et à analyser les formes d’interactions entre les savoirs et l’imaginaire mobilisé. Les mercredi 16 et jeudi 17 novembre 2016, deux intervenantes artistes et anthropologues, Annalisa Lollo et Laura Spica, mènent auprès d’un groupe de jeunes résident.e.s du foyer de jeunes travailleurs AAJT son atelier Muse-Me. Conçu comme un atelier de création artistique, il invite les participants à réaliser des portraits croisés, grâce à des collages faits à partir de matériaux divers. La superposition des images et motifs évoque la construction de l’identité à travers le temps et l’espace. Le groupe de participants se compose essentiellement de Mineurs Isolés Étrangers (désormais Mineurs Non Accompagnés).
Ce même mercredi, sur la place Caffo (13003), Le Tamis propose de réaliser une performance appelé Le Porteur de Parole. Cette activité qui a lieu sur une place publique invite les passants à répondre à une question, affichée par écrit de manière visible. Il s’agira par-là d’interroger les perceptions, représentations et imaginaires des passants, sur les notions d’identité, d’altérité, d’appartenance et de mobilité, de recueillir leurs témoignages et de les mettre en exergue. Il sera mené par les anthropologues Julia Henin et Alessandra Stefani.